Interview de Dominique Wolton

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Interview de Dominique Wolton, Président du CEP

Les publicitaires sont quasiment les seuls industriels qui s’imposent une autorégulation“.


Dominique Wolton

Directeur de l’Institut des sciences de la communication du CNRS (ISCC) [1], il préside depuis sa création en 2006 le Conseil de l’Ethique Publicitaire, qui a pour mission d’éclairer l’ARPP sur l’évolution des enjeux éthiques concernant la publicité. Entretien avec un homme, qui envisage l’autorégulation comme « l’écoute de points de vue différents et la recherche d’un arbitrage acceptable pour tous ».












Lors de votre nomination à la présidence du Conseil de l’Ethique Publicitaire, vous vous réjouissiez, en tant que scientifique, de vous pencher sur cette matière écartelée entre l’art, l’économie et la société qu’est la publicité. Quatre ans après, quel bilan faites-vous de cette
observation ?

Dominique Wolton : Le CEP est en fait le troisième comité d’éthique auquel je participe. J’ai été membre du CCNE, le Comité consultatif national d’éthique, puis du Comité d’éthique du CNRS. Aussi bien dans l’un que dans l’autre, j’y ai apprécié la grande ouverture et surtout la grande modestie de leurs membres malgré leur immense savoir. C’est une particularité que j’ai retrouvée au CEP dont j’ai cette fois-ci choisi les membres qualifiés. Nous avons un style de discussion contradictoire, un mode de cohabitation d’avis et de pensée qui rend ces réunions très stimulantes et très agréables. Nous ne sommes pas d’accord sur tout, mais c’est un lieu de liberté où la discussion nous enrichit. Ce qui nous permet de ne pas être trop langue de bois. Tout le monde est content d’y venir ! Et cela ne nous empêche pas de travailler puisque nous avons émis une douzaine d’avis, dont le dernier est consacré à la représentation des animaux dans la publicité.

Votre regard sur la publicité a-t-il changé depuis votre entrée en fonction ?

D.W. : Les publicitaires sont finalement des gens assez masochistes ! Ce sont quasiment les seuls industriels qui s’imposent une autorégulation. On comprend bien qu’il s’agit en fait de se réguler soit même pour éviter que d’autres vous imposent des règles plus strictes, mais quand on prend conscience des contraintes qui pèsent sur la publicité, on se demande comment les agences arrivent à créer. Et pourtant, elles sont très créatives. Je remarque au passage que, contrairement à certaines idées reçues, les agences françaises ne sont pas mauvaises du tout, compte tenu de l’environnement de limitation dans lequel elles évoluent.

Quels sont vos prochains chantiers?

D.W. : Nous en avons beaucoup puisque nous aborderons cinq à sept sujets en 2011, à commencer par celui sur « Information, communication et connaissance ». De belles discussions en perspective ! Finalement, nous
sommes plus un groupe de réflexion qu’un véritable comité d’éthique. Mais notre liberté de ton nous rend très complémentaires des deux autres instances de l’ARPP : le Conseil Paritaire de la Publicité et le Jury de Déontologie Publicitaire.


L’autorégulation : “un modèle communicationnel

Dominique Wolton a eu l’occasion de s’exprimer dernièrement sur l’autorégulation, qu’il définit comme « un modèle communicationnel » dans un pays qui a tendance à beaucoup légiférer.

Morceaux choisis… « À l’ARPP on dispose d’un document qui fait plus de 20 cm de hauteur et qui est le matelas des règles qui s’imposent. L’autorégulation vient après. C’est très intelligent. Cela consiste à respecter le point de vue des uns et des autres, à être obligés de négocier (…) C’est un modèle d’autorégulation qu’il va falloir développer dans notre société moderne, parce qu’il y aura toujours des lois et des règlements et, au bout d’un moment, il faudra laisser l’intelligence humaine dans la négociation des points de vue contradictoires.
Je ne comprends pas pourquoi ce modèle d’autorégulation n’a pas plus de faveur
» (…) « Dans une société où il y a des professions à haut niveau de contenu culturel, des enjeux d’argent et des enjeux d’intérêt général, je pense que le modèle d’autorégulation est un modèle à développer » (…).




Retrouvez l’Interview de Dominique Wolton dans La Lettre d’Information de l’Autodiscipline Publicitaire.

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Institut des sciences de la communication du CNRS

www.iscc.cnrs.fr

[1] Dominique Wolton est également fondateur et directeur de la Revue internationale Hermès et auteur de nombreux ouvrages sur les rapports entre communication et société.