Avis du CEP, avec le concours de l’EASA : Europe, autorégulation publicitaire et diversité culturelle

Octobre 2024


En préambule de cet avis, le Conseil de l’Éthique Publicitaire souhaite rendre hommage à Lucas Boudet, directeur général de l’Alliance européenne pour l’éthique en publicité (1978-2024). Sa gentillesse, sa disponibilité et sa connaissance ont nourri nos échanges. Sans ces nombreuses et riches discussions, cet avis ne serait pas ce qu’il est.

 Penser, c’est comparer[1] [2]

Comparer, c’est établir un parallèle entre des éléments afin d’en dégager les similitudes et les différences. Dans le cas de l’autorégulation publicitaire, la comparaison entre les différents pays européens montre qu’elle est majoritairement reconnue comme étant efficace, rapide et moins onéreuse pour le contribuable que le traitement des litiges classiques devant les juridictions judiciaires.

Éclairer l’ARPP et envisager l’avenir de l’autorégulation publicitaire nécessite de s’interroger sur ce qui nous distingue et ce qui nous rapproche des autres pays. Cela conduit à se demander : existe-t-il une volonté de réguler et/ou d’autoréguler davantage au niveau européen ? Qui le souhaite et pourquoi ? Est-ce envisageable ? Quels seraient les avantages ? Quelles seraient les limites ? Cela pose également la question de l’avance de l’autorégulation sur la loi : la loi rattrape-t-elle l’autodiscipline ? L’autorégulation est-elle une preuve d’ouverture ? Reflète-t-elle le débat public ? Quels sont les signaux faibles ?

Dans cet avis intitulé “Europe, autorégulation publicitaire et diversité culturelle”, nous posons tout d’abord le cadre de l’autorégulation au niveau international et dressons un état des lieux au niveau européen (partie 1). Ensuite, nous nous interrogeons sur la volonté d’établir une régulation et une autorégulation commune au niveau européen (partie 2). Puis, nous questionnons la possibilité d’une approche uniforme en tenant compte de la diversité culturelle en Europe (partie 3). Enfin, nous concluons en formulant des recommandations (partie 4).

Il est important de préciser que les chiffres, données et informations présentés sont fournis à titre indicatif pour aider à comprendre la situation et ne véhiculent en aucun cas un jugement de valeur.


SOMMAIRE

1/ Un cadre commun, une volonté partagée

1.1./ Le code de communication de la Chambre de commerce internationale
1.2./ L’autorégulation encouragée par l’Europe
1.3./ L’Alliance Européenne pour l’Ethique en Publicité : une réponse à la demande européenne
1.4./ Un dimensionnement et des sources de financement très variés
1.5./ Des jurys variés
1.6./ Le pouvoir des jurys européens

2/ Régulation, autorégulation : y a-t-il une volonté d’harmoniser au niveau européen ?

2.1./ Régulations nationales et publicité
2.2./ Une tendance à réguler davantage ?
2.3./ Quels partisans pour une régulation et une autorégulation supranationale ?
2.3.1/ Les marques internationales
2.3.2./ Les acteurs du numérique
2.3.3./ Les pouvoirs publics ?
2.4./ Les détracteurs de l’autorégulation, partisans de plus de réglementation
2.5./ L’autorégulation bientôt rattrapée par la régulation ?

3/ (In)compatibilité entre une approche uniforme et diversité culturelle ?

3.1./ Des volumes de plaintes différents selon les pays
3.2./ Motifs des plaintes et débats publics nationaux
3.3./ Convergences et divergences sur les plaintes

4./ Conclusion et recommandations


1/ Un cadre commun, une volonté partagée

Dans cette première partie, nous examinons le cadre international de l’autorégulation afin de bien comprendre ses fondements, établis par la Chambre de Commerce Internationale. Ensuite, nous nous concentrons sur l’Europe, animée par une volonté politique d’unité et ayant encouragé la création de l’Alliance Européenne pour l’Éthique en Publicité/European Advertising Standards Alliance (EASA). Enfin, nous procéderons à une comparaison des structures des membres de cette alliance, en considérant leurs ressources humaines et financières ainsi que le pouvoir des jurys.

1.1./ Le code de communication de la Chambre de commerce internationale

La Chambre de Commerce Internationale, ou International Chamber of Commerce (ICC), représente plus de 45 millions d’entreprises de tous les secteurs économiques dans plus de 170 pays. Sa mission consiste à promouvoir les échanges et les investissements internationaux, ainsi qu’à aider les entreprises à relever les défis et saisir les opportunités offertes par la mondialisation. La Chambre de Commerce Internationale bénéficie d’un statut consultatif auprès des Nations Unies. Ses activités se concentrent essentiellement sur trois domaines : la politique générale, l’élaboration de règles commerciales, et la résolution des litiges. Ses règles reposent exclusivement sur le principe de l’autodiscipline.

En 1937, la Chambre de Commerce Internationale a établi le “Code de pratiques loyales en matière de publicité” -souvent appelé “Code ICC”-, un ensemble de règles qui constitue la référence pour l’autorégulation professionnelle de la publicité. Ce code a une valeur importante en raison de son caractère historique et mondial, et parce que la Chambre de Commerce Internationale est reconnue au-delà du domaine publicitaire : il fait autorité. Ce Code ICC définit un cadre commun et pose des fondements universels. Depuis sa création, l’esprit du Code ICC repose sur son premier article, qui énonce que la publicité doit être légale, véridique, honnête, décente, et avoir le sens de la responsabilité sociale. Ce sont donc des règles de conduite globales pour une communication responsable.

La onzième actualisation du Code ICC a été formellement adoptée par les instances de l’ICC en juin 2024 et a fait l’objet d’un lancement officiel le 19 septembre 2024.

Au niveau européen, tous les organismes d’autorégulation appliquent les principes du Code ICC. Toutefois, l’usage et l’interprétation peuvent varier d’un pays à l’autre. La Finlande, la Suède et la Belgique appliquent directement le Code ICC en tant que tel, simplement en le traduisant dans la langue nationale. La Grèce et la Turquie l’appliquent moyennant certaines modifications liées à leur cadre juridique. C’est la jurisprudence qui va interpréter de manière stricte ou non les dispositions du code. Par exemple, en Suède, l’interprétation des règles générales permet de traiter de manière stricte les questions d’allégations environnementales. Dans la majorité des autres pays européens, les principes du Code ICC servent d’inspiration. Ces pays interprètent le Code selon leur culture et l’adaptent à leur contexte national en rédigeant des Code nationaux ou des recommandations spécifiques. Concernant l’articulation entre le Code ICC et les codes nationaux, on peut établir un parallèle avec les directives européennes, qui sont transposées au niveau national. Il est parfois reproché au Code ICC d’être trop général au regard de la législation en Europe, mais il faut considérer que ce code à vocation à s’appliquer au niveau mondial, où la latitude laissée par les différents cadres juridiques nationaux varie grandement. Y présenter des principes généraux est intentionnel ; ceci facilite l’adaptation aux cultures nationales ou régionales ainsi qu’aux évolutions des pratiques et des techniques.

En outre, le Code ICC est très utile pour l’élaboration d’un système d’autorégulation dans les pays qui n’en possèdent pas encore. Lorsqu’un nouvel organisme d’autorégulation se lance, il commence souvent par utiliser le Code ICC, qui peut être appliqué directement. Ensuite, progressivement, l’organisme développe des règles spécifiques, souvent de manière empirique, pour répondre à des besoins particuliers. Lorsque ces règles spécifiques se multiplient, l’organisme consolide l’ensemble dans un document unique : son propre code. En somme, le Code ICC est le plus petit dénominateur commun des différents systèmes d’autorégulation en Europe.

1.2./ L’autorégulation encouragée par l’Europe

En Europe, depuis les années 1980, les gouvernements européens ont promu des approches de « soft law », telles que les codes de conduite et les lignes directrices, favorisant l’autorégulation et la co-régulation[3]. En 2001, la Commission européenne a publié un livre blanc promouvant les mécanismes de corégulation, et le Conseil européen a chargé le groupe d’experts Mandelkern[4] de proposer un plan d’action pour une meilleure réglementation. Ce rapport considère l’autorégulation comme une alternative à la régulation. Un autre rapport, publié par la direction générale de la santé et de la protection des consommateurs sous la direction de Robert Madelin, a apporté un soutien politique important à la reconnaissance de l’autorégulation de la publicité. Depuis, l’autorégulation est reconnue dans plusieurs directives de l’UE, notamment en matière de publicité, de pratiques commerciales déloyales, ou encore de services de médias audiovisuels. Par ailleurs, la Commission Européenne reconnaît l’autorégulation et la co-régulation dans sa “boîte à outils pour une meilleure réglementation[5]” dont la dernière itération date de 2023. En outre, le Comité Économique et Social Européen a publié en 2015 un avis dans lequel il recommande que l’autorégulation et la co-régulation soient considérées comme des instruments importants pour compléter ou renforcer le droit dur.

1.3./ L’Alliance Européenne pour l’Ethique en Publicité : une réponse à la demande européenne

La création du marché unique européen[6] a fait émerger la nécessité de protéger le consommateur européen par-delà les frontières nationales et de gérer les plaintes transfrontalières. C’est dans ce contexte que l’Alliance Européenne pour l’Éthique en Publicité (ou European Advertising Standards Alliance – “EASA”) a été créée en 1992 par la profession, positionnant l’autorégulation comme une réponse à ce nouveau défi. L’Alliance Européenne pour l’Éthique en Publicité promeut des règles déontologiques pour la communication commerciale, tout en respectant la diversité culturelle et les réglementations nationales. L’EASA promeut et défend l’autorégulation publicitaire ; elle anime et coordonne un réseau d’organismes d’autorégulation nationaux.

Ainsi, l’Alliance émet des recommandations et facilite l’échange de bonnes pratiques. De plus, elle coordonne les plaintes transfrontalières.

L’Alliance Européenne pour l’Ethique en Publicité

L’Alliance Européenne pour l’Éthique en Publicité regroupe 28 organisations d’autorégulation publicitaire, couvrant 26 pays.

Les objectifs de l’Alliance sont notamment les suivants :

  • Promouvoir une publicité responsable grâce à une autodiscipline efficace en fournissant des orientations détaillées pour le développement et la mise en œuvre de l’autorégulation publicitaire, dans l’intérêt des consommateurs et des entreprises.
  • Établir des normes opérationnelles élevées pour les systèmes d’autodiscipline publicitaire.
  • Offrir un espace permettant à l’écosystème publicitaire de collaborer au niveau européen et international afin de relever les défis communs et d’assurer que les normes publicitaires soient adaptées pour l’avenir.

Le Bluebook

Dans le Bluebook, l’Alliance Européenne pour l’Éthique en Publicité présente l’organisation de chacun de ses 28 membres selon les critères suivants :

  • Structure, composition et financement
    • Statut et structure de l’organisme d’autorégulation
    • Responsabilités de l’organisme d’autorégulation
    • Mandat de l’organisme d’autorégulation
    • Reconnaissance politique et juridique
    • Adhésion et financement
  • Activités de l’organisme d’autorégulation
    • Communication
    • Formation et éducation
    • Conseils tous médias et avis préalables TV avant diffusion
    • Suivi
    • Traitement des plaintes et médiation
    • Sanctions
    • Feuille de route pour le traitement des plaintes
  • Codes et règles
    • Vue d’ensemble
    • Règles couvertes par le code
    • Codes et règles d’autorégulation spécifiques à un produit ou à un secteur
    • Validation de la charte
    • Tableau de bord de la mise en œuvre des meilleures pratiques
    • Mise en œuvre du cadre ICC
  • L’actualité chaude
www.easa-alliance.org/publication/blue-book/

1.4./ Un dimensionnement et des sources de financement très variés

Les effectifs des organismes d’autorégulation illustrent ces disparités : certains ne comptent qu’un ou deux collaborateurs, tandis que d’autres en emploient plusieurs dizaines. On peut émettre l’hypothèse que cela a des conséquences sur leur capacité à absorber un volume plus ou moins élevé de plaintes qui, lui-même, pourrait dépendre de la taille du marché concerné – le nombre de plaintes pourrait aussi dépendre de l’obligation (ou non) des avis préalables. Cependant, un effectif réduit pourrait aussi être interprété comme un signe d’efficacité. Le CEP ne privilégie aucune de ces hypothèses, qui relèvent de décisions des gouvernances interprofessionnelles nationales. De la quasi seule activité de traitement des plaintes, à une action majoritairement préventive, avant diffusion, la différence de taille pourrait aussi expliquer l’innovation de certains organismes. Ceux disposant d’équipes plus étoffées ont les moyens de lancer de manière proactive des projets allant au-delà de la gestion quotidienne, par exemple en participant à des groupes de travail et de réflexion organisés par des tiers, en anticipant la création de règles et en optimisant la gestion des plaintes des consommateurs. L’ARPP a ainsi innové en utilisant l’intelligence artificielle pour la reconnaissance d’image afin d’accélérer l’étude des non-conformités. La France a présenté les premiers cas d’usage de l’IA au réseau de l’Alliance Européenne pour l’Ethique en Publicité en 2018, suivie par le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Désormais, treize pays utilisent des technologies informatiques pour analyser les publicités en ligne à grande échelle. De son côté, l’organisme espagnol Autocontrol a développé le « cookie advice« , un conseil volontaire avant diffusion concernant l’utilisation des cookies et des données pour la publicité. Ici, la question est de traiter de l’usage éthique des données pour le ciblage publicitaire, conformément aux règles européennes, notamment le RGPD. Cette approche n’a pas été adoptée dans certains autres pays en raison du contexte local : par exemple, en France, le sujet est largement géré par la CNIL, autorité administrative indépendante.

Concernant le financement, la plupart des organismes d’autorégulation européens s’appuient sur les adhésions et les conseils avant diffusion. Cependant, au Royaume-Uni, en Irlande, aux Pays-Bas, en Suède et en Grèce, le financement repose sur un système différent, communément appelé le “levy”. Il s’agit d’un prélèvement réalisé par les agences, facturé en sus de leurs tarifs, qui est reversé au bénéfice du système d’auto-régulation local. Ce système génère des revenus nettement plus importants pour certains de ces organismes comparé à d’autres. D’autre part, dans certains pays, des frais de procédure sont imposés aux sociétés. Par exemple, au Portugal, une société membre de l’autorégulation qui souhaite attaquer une publicité d’un concurrent doit régler 850 €. Ces financements permettent à l’organisme de mener des investigations approfondies.

Cela soulève des questions sur le mode de financement des organismes d’autorégulation. Cependant, cette interrogation doit être subordonnée à une autre : les organismes d’autorégulation ont-ils besoin de plus de financement ? Et si oui, pour répondre à quels besoins ? À ce jour, les professionnels semblent satisfaits des modes de fonctionnement de leur organisme.

En tout état de cause, une comparaison des organismes d’autorégulation européens doit s’apprécier au regard des ressources humaines et financières que chaque pays y consacre, ce qui détermine leur proactivité et la visibilité de leurs actions.

Effectif et financement des organismes d’autorégulation

De façon à permettre une lecture facilitée de la situation, nous nous restreignons à présenter les données d’une dizaine d’organismes représentatifs des pays d’Europe du Nord, du Sud, de l’Est et de l’Ouest.

1.5./ Des jurys variés

La question de la composition des jurys est particulièrement intéressante, car ces derniers ne rassemblent pas toujours les mêmes parties prenantes. Dans certains pays, les jurys incluent des représentants de la profession, tandis que dans d’autres, comme l’Espagne, la France et l’Italie, ce n’est pas le cas. Certains jurys intègrent également des représentants des consommateurs, comme en Espagne, aux Pays-Bas et en Suède. L’absence de représentants des consommateurs dans certains jurys pourrait constituer une critique légitime et soulève des interrogations sur l’ouverture des jurys à une représentativité des consommateurs et du monde associatif.

Composition des jurys

Le CEP a relevé que l’appel n’est pas admis dans tous les pays. Par exemple, il est possible en Allemagne (devant les juridictions judiciaires) et en Suède, mais pas en Italie et au Portugal. Au Royaume-Uni, comme en France, il est soumis à l’analyse du Réviseur de la déontologie publicitaire.

Le CEP a également noté l’existence d’un service de médiation au Portugal et au Royaume-Uni. Si les parties trouvent un accord avec l’aide du jury, ce dernier ne rend pas d’avis. Ainsi, si un annonceur s’engage à modifier une publicité et son concurrent s’engage à retirer sa plainte, alors il n’y a pas de publication. Ce système de médiation est à rapprocher du “Réglement amiable”[7] français, souvent proposé par les présidents du Jury de Déontologie Publicitaire, mais rarement accepté par les plaignants.

1.6./ Le pouvoir des jurys européens

Si la plupart des sanctions reposent sur le principe de “nommer pour discréditer” (“name and shame”), certains jurys semblent disposer d’une capacité de pression plus étendue que celle du Jury de Déontologie Publicitaire français (JDP), même si les statuts de l’ARPP fournissent à sa gouvernance des moyens d’actions similaires.

  • Au Royaume-Uni, l’Advertising Standards Authority (ASA) peut émettre des notices d’avertissements aux éditeurs des médias pour que les publicités qui violent les codes ne soient pas diffusées. L’ASA peut également faire retirer les annonces de recherche payantes d’un annonceur lorsqu’une publicité sur Google est en violation du code. L’ASA tient une liste des annonceurs qui ont tendance à faire trop de publicités considérées comme mensongères sur leurs sites internet, ainsi qu’une liste des créateurs de contenus qui ne respectent pas le Code (ce qui peut influencer le choix des créateurs de contenus par les agences et les annonceurs). La France a une approche différente : elle valorise les créateurs de contenus qui ont un bon comportement avec le “Certificat de l’influence responsable”[8].
  • En Allemagne, le Deutscher Werberat peut demander l’arrêt de la diffusion d’une publicité en violation du code. Ce pouvoir repose sur le principe que les annonceurs adhérents de l’organisme d’autorégulation acceptent de respecter les décisions du jury. Si l’annonceur n’arrête pas la diffusion d’une publicité dont la plainte est fondée, le Deutscher Werberat peut publier une réprimande qu’il rend publique.
  • En Italie, l’Istituto dell’Autodisciplina Pubblicitaria peut ordonner à un annonceur de mettre fin à une campagne publicitaire dans un délai contraignant, et tous les médias sont tenus de se conformer à cette décision. En cas de non-respect, une notification du comportement peut être publiée dans les médias que l’autorité estime appropriés.
  • En Hongrie, le non-respect de la décision du jury peut entraîner la résiliation de l’adhésion de l’annonceur du Önszabályozó Reklám Testület. En France, la résiliation de l’adhésion d’un membre qui ne se conforme pas à une décision du JDP doit être validée par le Conseil d’administration de l’ARPP.

L’étude du cadre révèle une volonté historique de promouvoir l’autorégulation au niveau de chaque pays européen. Toutefois, de grandes différences structurelles et opérationnelles existent entre les différents organismes d’autorégulation. La question qui se pose est de savoir s’il existe une volonté d’aller plus loin en renforçant une autorégulation commune, voire en renforçant la législation elle-même.

2/ Régulation, autorégulation : y a-t-il une volonté d’harmoniser au niveau européen ?

Dans cette deuxième partie, nous commençons par examiner les régulations nationales. Puis nous nous interrogeons : existe-t-il une tendance à réguler plus et quels en sont les partisans ? Enfin, nous examinons les relations entre l’autorégulation et la régulation.

2.1./ Régulations nationales et publicité

En plus des principes d’autorégulation partagés par tous les pays européens, ces derniers disposent d’un droit dur reposant sur des règles très communes. La plupart des pays s’appuient sur le code de la consommation, les réglementations sur la concurrence déloyale et la protection des consommateurs, ainsi que sur les lois relatives aux médias. En France, le socle reste principalement la Directive Pratiques Commerciales Déloyales, transposée dans le Code de la consommation, donc de la compétence de la DGCCRF.

Certains pays ont des lois spécifiques sur la publicité, comme la « Loi sur les communications de 2003 » au Royaume-Uni, la « Loi générale sur la publicité » en Espagne, la Loi n° 147/2001 en Slovaquie, qui réglemente le contenu de la publicité, sa distribution, ainsi que les droits et obligations des annonceurs, la « Loi sur la publicité » en Tchéquie, ou la « Loi sur la publicité économique » en Hongrie, qui définit les conditions de base et certaines restrictions en matière de publicité commerciale. En France, il n’y a pas de « Code de la Publicité » parmi la soixante dizaine de Codes existants en France ; en revanche, des “Articles publicité” figurent dans des lois plus générales, telles que la Loi d’Orientation des Mobilités et la Loi “Climat et Résilience », par exemple pour ce qui concerne la publicité automobile.

Une majorité des secteurs et sujets couverts par des propositions législatives dans les pays européens sont assez largement partagés. Ceux-ci incluent les services financiers, les médicaments, les produits sanitaires, les aliments pour enfants, les jeux d’argent et de hasard, l’alcool, ainsi que la création de contenu (influence).

Dans certains pays, la réglementation est décentralisée. En Espagne, les dix-sept communautés autonomes imposent des règles spécifiques pour la publicité extérieure. Aux Pays-Bas, certaines municipalités imposent des restrictions locales sur la publicité extérieure pour la viande. La ville d’Édimbourg quant à elle va interdire la publicité pour les compagnies aériennes ou les voitures à moteur thermique.

Au-delà de l’autorégulation et de la régulation au niveau national, voire local, le CEP s’est interrogé sur l’existence d’une volonté de réguler et/ou d’autoréguler à l’échelle européenne.

2.2./ Une tendance à réguler davantage ?

La question de la volonté croissante d’une régulation supranationale interroge sur la tendance à toujours vouloir renforcer la réglementation, tant au niveau de l’Union européenne qu’au niveau national. La tendance à réguler davantage est persistante, soutenue par les institutions européennes, les gouvernements nationaux, et divers groupes d’intérêt. Cette tendance vise à harmoniser le marché, protéger les consommateurs et répondre aux préoccupations environnementales et sociales.

Les pouvoirs publics souhaitent être vus comme réactifs et pertinents, même lorsque les problèmes ne nécessitent pas toujours une nouvelle législation. Les sujets à réguler changent selon les pressions sociales, les événements nationaux ou les changements de gouvernement.

A l’inverse, il y a aussi une volonté de simplification pour éviter la sur-régulation. Ainsi le “programme pour une meilleure réglementation” (“better regulation agenda« ) appliqué depuis une dizaine d’années a pour objectif de simplifier la réglementation de l’UE. La présidente de la Commission européenne a réitéré de telles intentions, avec un Vice-Président chargé de cette simplification et qui devra rendre compte chaque année devant le parlement[9].

De plus, certains constatent une certaine lassitude vis-à-vis de la législation, après l’achèvement de cadres réglementaires majeurs comme la loi sur les marchés numériques (DMA), la loi sur les services numériques (DSA) et la loi européenne sur l’intelligence artificielle. Certains États membres se concentrent désormais sur l’application pratique des réglementations existantes afin de garantir qu’elles atteignent les résultats escomptés plutôt que sur l’introduction de nouvelles lois.

Le ressenti d’une volonté de renforcer la régulation est donc à nuancer.

2.3./ Quels partisans pour une régulation et une autorégulation supranationale ?

Il est indéniable que certains acteurs souhaitent (et travaillent activement pour) une régulation et/ou une autorégulation renforcée au niveau européen.

2.3.1/ Les marques internationales

Les marques internationales ont besoin d’une harmonisation des régulations à la fois législatives et professionnelles pour simplifier la conformité et réduire les coûts liés aux campagnes publicitaires internationales. Une réglementation supranationale cohérente et prévisible faciliterait, selon elles, l’accès aux marchés et encouragerait l’innovation et les investissements à long terme. Elle renforcerait également la confiance des consommateurs, particulièrement dans des domaines comme la protection des données, la durabilité environnementale et la responsabilité des entreprises. C’est pourquoi de nombreuses marques soutiennent des normes globales, comme celles du code ICC, qu’elles adaptent ensuite aux spécificités locales.

Cependant, une harmonisation complète des régulations reste difficile à atteindre, car chaque pays peut interpréter et adapter les règles européennes de manière différente, parfois en ajoutant des restrictions supplémentaires. Ces adaptations nationales peuvent même influencer les chartes internes que les entreprises s’imposent au niveau international : des règles locales deviennent des standards globaux. Par exemple, la recommandation de l’ARPP, reprise dans le Code de l’environnement, enjoint de ne pas montrer de véhicules dans des espaces naturels ; cela pourrait inciter un constructeur allemand à développer une campagne spécifique pour ce marché, mais aussi à appliquer cette contrainte au niveau international et non pas seulement français.

Pour certains annonceurs, la conformité en France et en Allemagne est souvent perçue comme une garantie de conformité dans d’autres pays européens, en raison de la rigueur des régulations dans ces deux pays, notamment sur la publicité pour l’alcool.

De même, certaines problématiques communes à plusieurs pays peuvent voir des solutions locales devenir intéressantes à adopter à l’international. C’est le cas avec les créateurs de contenus et le Certificat de l’influence responsable développé par l’ARPP, qui a vocation à devenir un certificat européen[10] en collaboration avec l’Alliance Européenne de l’Éthique en Publicité. Ce sujet intéresse les annonceurs internationaux et a, par exemple, été discuté lors des réunions de la Fédération Mondiale des Annonceurs (WFA, World Federation of Advertisers).

Le CEP s’est également penché sur les conséquences sur la création de la diversité des systèmes d’autorégulation. Bien que l’autorégulation soit souvent perçue comme une contrainte, il semblerait que cela ne nuise pas à la créativité, car cette contrainte est acceptée dans la mesure où elle est co-construite avec les représentants des professions publicitaires. La diversité des cadres d’un pays à l’autre oblige les marques à adapter leurs messages et leurs stratégies pour répondre à des normes nationales et à des attentes culturelles spécifiques. Un concept publicitaire commun peut être décliné avec des adaptations selon les pays. La nécessité de s’adapter à différents contextes culturels stimule souvent l’innovation et la créativité.

C’est au nom de la liberté d’expression, ainsi que pour maintenir un bon niveau de créativité, que les règles sont souvent formulées de manière négative (« il ne faut pas représenter / dire / faire ») plutôt que positive (« il faut représenter / dire / faire ») : ce qui n’est pas interdit est autorisé.

2.3.2./ Les acteurs du numérique

Les grandes plateformes numériques, telles que Meta, Google et Amazon, sont fortement demandeuses d’une harmonisation à l’échelle internationale, qui leur apporterait cohérence et prévisibilité. Leurs politiques sont globales, et elles ne peuvent pas – ou ne souhaitent pas – systématiquement les adapter aux spécificités locales. D’ailleurs, le CEP a noté que dans le rapport de Google sur les annonces bloquées en ligne, la plateforme ne fournit pas d’informations détaillées par pays.

Cependant, les dirigeants des grandes plateformes numériques savent bien qu’une harmonisation complète n’est pas réalisable. En pratique, ils ne peuvent pas se soustraire à une adaptation nationale en raison des différences non seulement législatives mais aussi culturelles. Cela refléterait un manque d’écoute des enjeux locaux.

Les acteurs de l’achat programmatique, qu’il s’agisse du web, des réseaux sociaux ou désormais de l’affichage numérique, s’interrogent également sur les règles à adopter. Comment autoréguler des contenus qu’un média reçoit quelques secondes avant leur diffusion ? Le défi du temps réel semble nécessiter la mise en place d’outils technologiques pour accepter ou non l’affichage d’une campagne. La complexité réside dans l’identification des visuels problématiques afin de les rediriger, non pas vers l’écran, mais vers un canal de validation. Cela soulève la question d’un changement de paradigme, passant du contrôle ex-post au contrôle ex-ante.

Treize organismes d’autorégulation européens utilisent l’intelligence artificielle pour analyser à grande échelle les publicités avant leur diffusion, mais cela pose des défis en termes de perception du rôle de l’autorégulation et du jugement a priori ou a posteriori.

Google fait également des efforts pour vérifier les publicités avant leur diffusion, en les supprimant ou en les restreignant. Cependant, Google le fait surtout sur des motifs légaux (annonces frauduleuses, produits illicites…) et non en vertu du code d’autorégulation en vigueur dans le pays de diffusion. La complexité qu’il y a à traiter par l’intelligence artificielle les infractions au code de chaque organisme d’autorégulation vient du fait qu’il y a des règles mais surtout des cultures différentes pour chaque pays, lesquels acceptent ou non certains usages ou formulations.

Le principal risque de l’automatisation, que ce soit par les organismes d’autorégulation ou des plateformes, est de trouver le bon équilibre : trop de restrictions pourraient censurer des contenus acceptables, tandis que trop peu pourraient laisser passer des contenus inappropriés, entraînant la frustration des annonceurs dans un cas ou des consommateurs et des régulateurs publics dans l’autre.

2.3.3./ Les pouvoirs publics ?

La Commission européenne et le Parlement européen, dans les limites de leurs prérogatives et dans le respect du principe de subsidiarité, soutiennent l’harmonisation des réglementations pour favoriser l’intégration du marché et garantir des normes élevées dans tous les États membres.

La Commission est composée d’experts chargés de mettre en œuvre les orientations stratégiques de la mandature. Ces experts sont censés être à l’écoute de toutes les parties prenantes, capables de décrypter les messages et d’attribuer un facteur de pondération à chaque voix pour trouver une solution médiane. Ils peuvent ainsi filtrer les pressions exercées par les détracteurs de l’autorégulation. Il est important qu’au sein de la Commission les Directions Générales concernées soient bien informées des pratiques d’autorégulation publicitaire.

Le Parlement est plus fragmenté, avec des positions de principe variées. Certains sont opposés à l’autorégulation, tandis que d’autres sont pro-affaires et favorables à l’autorégulation. Les discussions de l’Alliance Européenne pour l’Ethique en Publicité se déroulent au Parlement avec les rapporteurs, co-rapporteurs et shadow rapporteurs issus des autres partis (ils peuvent aussi venir du parti majoritaire). C’est un travail démocratique avec des positions tranchées.

Au plan national, certaines autorités gouvernementales considèrent l’autorégulation comme une partie de la solution pour promouvoir une publicité responsable, tandis que d’autres la perçoivent comme insuffisante (sans pour autant l’évaluer et la considérer comme un facteur de problèmes). Selon les cultures, parfois, les parties prenantes, publiques et privées, peuvent entretenir un dialogue permanent et apaisé pour avancer ; parfois, la relation est plus conflictuelle. Dans l’ensemble, les organismes d’autorégulation affirment entretenir des relations étroites et positives avec les autorités gouvernementales.

Au Royaume-Uni, en Irlande et en Espagne, les pouvoirs publics délèguent une part de leur charge de travail aux organismes d’autorégulation. Au Royaume-Uni, ces organismes jouissent d’une grande notoriété auprès du public, ce qui n’est pas toujours le cas ailleurs. Une étude récente en Angleterre tend à démontrer que plus l’organisme d’autorégulation est connu, plus la confiance dans la publicité augmente. Les personnes ayant vu la campagne de l’Advertising Standards Authority sont deux fois plus susceptibles de faire confiance aux publicités et à l’industrie de la publicité.

Le CEP s’interroge sur la nécessité d’un travail visant à renforcer la reconnaissance des organismes d’autorégulation par le grand public, afin de consolider la confiance des pouvoirs publics et de la société civile.

2.4./ Les détracteurs de l’autorégulation, partisans de plus de réglementation

Bien que certains acteurs soutiennent une régulation ou une autorégulation européenne, d’autres privilégient clairement le recours à une réglementation stricte. Les opposants à l’autorégulation, tels que les groupes de protection des consommateurs, certaines ONG, et des décideurs politiques, estiment que l’autorégulation manque de mécanismes d’application efficaces pour garantir le respect des règles et protéger le public.

Historiquement, la demande pour une réglementation plus stricte a concerné des thèmes comme la véracité, la loyauté, la protection de l’enfance, et l’image de la femme, tandis que les préoccupations écologiques sont plus récentes. Récemment, l’influence de ces opposants a augmenté avec la sensibilisation accrue du public à des enjeux comme la confidentialité des données, la durabilité environnementale, et la responsabilité des entreprises.

Des organisations comme le BEUC (Bureau Européen des Unions de Consommateurs) militent pour une législation plus stricte au niveau de l’UE, arguant que l’autorégulation ne garantit souvent pas des pratiques équitables et transparentes. Greenpeace, également, appelle à des régulations plus rigides, critiquant l’autorégulation dans des secteurs tels que le pétrole et le gaz pour son insuffisance face aux enjeux environnementaux. Ces groupes soutiennent que seule une réglementation contraignante peut assurer une responsabilité adéquate et une protection suffisante du public. Elles plaident pour des réglementations supranationales afin d’éviter la fragmentation des cadres réglementaires et de relever efficacement les défis mondiaux.

Cette préférence pour la réglementation sur l’autorégulation pose la question de savoir si l’autorégulation est encore efficace ou si elle est appelée à être progressivement supplantée par des règles plus strictes.

2.5./ L’autorégulation bientôt rattrapée par la régulation ?

Il existe des mouvements parallèles entre l’autorégulation et la réglementation, car les règles déontologiques et le droit accompagnent les évolutions de la société. Réglementation et autorégulation entretiennent une relation d’interdépendance où chacune peut inspirer l’autre.

L’autorégulation a parfois devancé la réglementation. Prenons l’exemple des allégations environnementales. Le document complémentaire (“framework”) du Code ICC, développé en 2021-2022, a précisé l’application des règles sur les allégations environnementales, avant même la mise en place des directives du Green Deal. De nombreux organismes d’autorégulation ont établi des règles spécifiques pour la publicité écologique, anticipant la future régulation européenne. Pour mémoire, a première recommandation de l’ARPP relative aux arguments écologiques dans la publicité remonte à 1990 (à l’époque, le BVP).

Lorsqu’un secteur d’activité met en œuvre des mesures d’autorégulation efficaces, ces pratiques servent souvent de modèles pour la législation. Cela est particulièrement évident dans le secteur des nouvelles technologies du numérique, où les normes de modération de contenu et de sécurité des données mises en place par le secteur peuvent inspirer les régulateurs lors de l’élaboration de nouvelles lois.

Ces convergences posent-elles problème ? Pas nécessairement, car l’autorégulation, grâce à sa réactivité, ses mécanismes de décision rapides et sa gestion des plaintes, montre ce qui est faisable et efficace. Elle guide ainsi le législateur dans l’élaboration de règles pratiques et complètes. Cela permet au secteur d’être préparé lorsque la réglementation entre en vigueur.

À l’inverse, la réglementation peut parfois précéder l’autorégulation. La réglementation fixe des normes minimales, incitant les entreprises à adopter des pratiques d’autorégulation pour assurer et parfois dépasser la conformité. Le Règlement général sur la protection des données (RGPD) en est un exemple, ayant poussé les entreprises à renforcer leurs politiques de confidentialité au-delà des exigences légales.

La relation entre réglementation et autorégulation est donc symbiotique. Par exemple, au Portugal, la Constitution est intégrée à l’autorégulation. La coopération avec les juridictions judiciaires montre aussi la perméabilité entre le droit dur et le droit souple. Au Royaume-Uni, l’Advertising Standards Authority peut renvoyer une affaire aux autorités chargées des normes commerciales ou transmettre une plainte à l’Ofcom. Si la violation dépasse le cadre de l’autorégulation, le Deutscher Werberat peut transmettre la plainte à l’autorité compétente. Lorsqu’il s’agit de problématiques de contenu ou de droit de la presse, la plainte peut être transmise au conseil de la presse allemand. Dans certains cas, un appel est possible devant les juridictions judiciaires.

En Italie, la Cour de cassation considère la violation du code d’autorégulation comme un acte de concurrence déloyale. En effet, ce comportement ne correspond pas aux normes du marché en matière de concurrence saine entre les opérateurs.

Certains acteurs, que nous avons évoqué, penchent en faveur d’une autorégulation, voire d’une régulation supranationale, au niveau européen. Dès lors, nous devons nous interroger : certains éléments ne semblent-ils pas démontrer une incompatibilité entre la diversité des cultures, les différentes interprétations et une approche uniforme ?

3/ (In)compatibilité entre une approche uniforme et diversité culturelle ?

Pour faire ressortir les ressemblances et les différences au niveau de l’autorégulation, nous nous intéressons dans cette troisième partie aux plaintes. Que nous disent les volumes ? Et les motifs ? Quel traitement recevrait une même plainte dans des pays différents ?

3.1./ Des volumes de plaintes différents selon les pays

Le nombre de plaintes constitue un indicateur intéressant de l’activité de l’autorégulation en matière de publicité. Bien que l’activité des organismes d’autorégulation ne se limite pas au traitement des plaintes, ces dernières peuvent refléter la perception qu’ont les Européens de la publicité et de sa régulation.

En 2022, l’Alliance Européenne pour l’Éthique en Publicité a enregistré 50 029 plaintes concernant 24 420 publicités, reçues par 26 organismes d’autorégulation européens. Le Royaume-Uni et l’Allemagne représentaient 79 % de toutes les plaintes reçues en Europe.

Il n’existe pas de tendance claire concernant l’évolution du volume de plaintes en Europe. Celui-ci varie en dents de scie d’une année à l’autre. Ce constat s’applique aussi bien aux grands organismes, comme l’Advertising Standards Authority au Royaume-Uni, qu’aux plus petits organismes, tels que le Rada Pre Reklamu en Slovaquie ou le Reklam Özdenetim Kurulu en Turquie. Le volume de plaintes évolue plutôt de manière irrégulière qu’avec une dynamique stable au fil du temps.

Nombre de plaintes dans les 25 pays de l’EASA

En revanche, il existe une disparité notable dans le volume de plaintes traitées par les organismes d’autorégulation des différents pays. Parmi les 26 organismes membres de l’EASA en 2022, sept concentrent plus de 95 % des plaintes entre 2018 et 2022. Les deux organismes recevant le plus de plaintes sont ceux du Royaume-Uni et de l’Allemagne, qui à eux seuls représentent 80 % des plaintes.

Répartition des plaintes par pays

Différents facteurs pourraient expliquer ces disparités ainsi que la « surreprésentation » du Royaume-Uni et de l’Allemagne en matière de plaintes.

Tout d’abord, la variation de l’intensité de l’activité publicitaire d’un pays à l’autre peut constituer un facteur explicatif. L’intuition est que plus l’activité publicitaire est intense dans un pays, plus la publicité interpelle le public, générant ainsi davantage de plaintes. En croisant le nombre de plaintes avec les dépenses publicitaires par habitant des différents pays européens, on observe une relation exponentielle entre l’activité publicitaire et le volume de plaintes. Un pays qui échappe à cette règle est la Suède, où, malgré des dépenses publicitaires par habitant élevées, le nombre de plaintes reste faible.

Corrélation entre le volume de plaintes et l’intensité publicitaire

D’autres hypothèses peuvent aider à comprendre le nombre élevé de plaintes au Royaume-Uni :

  • Au Royaume-Uni, les décisions de l’ASA sont publiées chaque mercredi et reprises par les médias. Cela peut être l’un des objectifs recherchés par les plaignants, qu’il s’agisse de consommateurs ou de concurrents : discréditer l’annonceur fautif. En Suède, les médias peuvent également relayer les décisions du jury.
  • Le logo de l’ASA et la mention « En cas de problème, appelez-nous » ont longtemps été apposés à côté des publicités dans la presse. En France, même s’il s’agissait d’une visibilité toute relative, le logo du BVP (ancêtre de l’ARPP) a longtemps été présent dans l’ours des titres de presse.
  • La notoriété de l’ASA, c’est-à-dire la reconnaissance des autorités d’autorégulation par le grand public, aurait une influence sur le nombre de plaintes.

Plus généralement, la propension à se plaindre varie d’un État à l’autre. Le nombre de plaintes par pays peut être influencé par son histoire et sa culture.

Historiquement, dans les pays anglo-saxons au cours des deux derniers siècles, lorsqu’un problème survenait, les habitants étaient encouragés à écrire à leurs parlementaires et aux autorités ; aujourd’hui encore la connexion est très directe entre le citoyen britannique et les parlementaires. Ce lien direct au centre de décision peut sans doute être transposé à l’ASA. A cela pourrait s’ajouter l’encouragement du consommateur à prendre ses responsabilités et à déposer une plainte quand il l’estime nécessaire. Les Français, quant à eux, auraient tendance à se plaindre, mais sans aller jusqu’à déposer une plainte officielle. Une autre explication porterait sur les influences de la culture britannique de la common law, qui prend sa source dans la jurisprudence plutôt que dans les textes de lois. Cela inciterait plus facilement les Britanniques à recourir à l’autorégulation pour créer un précédent. Là où en France, et plus largement en Europe, le droit romano-civiliste précède le rappel à l’ordre : on a plus tendance à recourir au droit dur (hard law) qu’à la jurisprudence (ce qui pourrait d’ailleurs expliquer une partie de la défiance dans l’autorégulation).

Dans les pays de l’Europe de l’Est, lors de la mise en place plus récente des systèmes d’autorégulation, le nombre de plaintes était faible, car les citoyens se souvenaient qu’autrefois, se plaindre pouvait entraîner des répercussions graves. L’héritage historique du contrôle centralisé a également pu affecter la confiance dans l’autorégulation. Une autre hypothèse concerne une possible méfiance vis-à-vis du pouvoir politique. Malgré un changement de régime, après un demi-siècle de totalitarisme, la conscience collective pourrait garder une certaine méfiance voire même un manque total de confiance dans le système politique du pays. Ainsi, porter plainte auprès d’une institution officielle serait rarement envisageable. D’autant plus que les engrenages administratifs peuvent paraître lents, injustes, voire corrompus. Dans une certaine mesure, cette méfiance, justifiée ou non, pourrait être transposée aux organismes d’autorégulation locaux.

On pourrait également supposer que la différence entre les pays en ce qui concerne le nombre de plaintes pourrait être liée à la gestion pré ou post diffusion (avis avant la diffusion de la publicité ou non). En France, le faible nombre de plaintes pourrait s’expliquer par le travail réalisé en amont, notamment le conseil et l’avis avant diffusion[11]. Néanmoins c’est aussi le cas au Royaume-Uni, avec Clearcast qui vérifie toutes les publicités avant diffusion en télévision, Radiowatch qui fait de même pour la radio et la Cinema Advertising Association (CAA) pour le cinéma avec le Copy Panel, pourtant le nombre de plaintes est cent fois supérieur.

Il n’existe pas de raison unique et universelle permettant de comprendre le volume de plaintes dans les différents pays. C’est plutôt une combinaison de facteurs liés à l’histoire, aux usages, aux comportements, aux marchés, et à tout ce qui constitue l’identité culturelle des pays.

3.2./ Motifs des plaintes et débats publics nationaux

Le premier motif de plainte concerne les publicités trompeuses (“misleading”). Ce point est intéressant car il rappelle la raison d’être initiale de l’autorégulation en France. Les différentes initiatives qui présideront à la création de l’Office de Contrôle des Annonces (ancêtre de l’ARPP) comme la « Vérité en Publicité » s’attèlent ainsi “à combattre les annonces mensongères et à améliorer l’image de la publicité aux yeux du public[12].

Un siècle plus tard, le CEP s’est demandé si la régulation de la publicité trompeuse reste le principal travail des organismes d’autorégulation. Dans le détail, la forte part des recours pour publicités trompeuses s’explique par la surreprésentation du Royaume-Uni dans le volume des plaintes. En rentrant dans le détail des motifs par organisme, il apparaît que chaque pays dispose de thèmes et préoccupations qui lui sont propres.

Principaux motifs de plaintes

La nature des plaintes paraît refléter le débat public et illustrer la diversité culturelle.

Note : ces proportions sont basées sur les plaintes associées à un motif. Pour chaque organisme d’autorégulation, un certain nombre de plaintes ne sont pas associées à un motif.

La nature des plaintes paraît refléter le débat public et illustrer la diversité culturelle.

La question environnementale est très présente en Italie, en Hongrie, en Allemagne et en Suède. On observe une préoccupation croissante du public concernant le changement climatique et la responsabilité sociale des entreprises, ce qui se traduit par une augmentation du nombre de plaintes ces dernières années. Des pays comme l’Allemagne ou les pays nordiques ont des réglementations environnementales plus strictes que celles où la croissance économique est la priorité. Ces divergences doctrinales mettent en évidence les difficultés à créer des cadres unifiés respectant diverses valeurs et priorités culturelles.

Au Royaume-Uni, le débat sur la déconsommation est présent. Des organisations militantes utilisent le système de plaintes de l’Advertising Standards Authority pour dénoncer le rôle que la publicité jouerait, selon elles, dans l’urgence climatique.

L’image du corps dans la publicité suscite des débats en Suède. On observe une augmentation des plaintes concernant le secteur de l’habillement et sa responsabilité sociale dans la représentation des diverses images corporelles. En revanche, les plaintes pour discrimination fondée sur le sexe ont diminué ces dernières années. Les stéréotypes sont moins présents, ce qui se reflète dans des publicités plus conformes aux normes actuelles, un sujet que l’autorégulation suédoise a abordé. La baisse du volume des plaintes pourrait indiquer que l’autorégulation fonctionne et que les annonceurs s’adaptent. Mais on pourrait également émettre l’hypothèse d’une radicalisation des critiques de la publicité et de l’autorégulation, avec un abandon des plaintes auprès des organismes d’autorégulation, estimant qu’ils ne font pas suffisamment leur travail. Dans ce cas, la diminution du volume de plaintes pourrait indiquer un manque de confiance dans l’autorégulation.

Lorsque le mouvement « Black Lives Matter » a commencé aux États-Unis, le Deutscher Werberat a reçu de nombreuses plaintes concernant le racisme dans la publicité.

Au Portugal, les débats sociétaux ont tendance à se dérouler d’abord au sein de la société civile avant d’être pris en charge par l’autorégulation, qui se charge de traiter les plaintes. Cela entraîne une certaine dissonance entre les sujets socialement brûlants et les objets des décisions parajudiciaires ou judiciaires.

Concernant le débat public, le CEP s’est interrogé sur le glissement d’une régulation axée sur la santé publique (sucré/salé, tabac, alcool…) vers une normalisation des modes de vie autour d’un schéma environnemental perçu par certains comme potentiellement excessif (interdiction des trajets en avion de moins de deux heures, des énergies fossiles, incitation à ne plus prendre la voiture…). Le CEP s’est également penché sur les pressions sociétales pour que la publicité soit plus politiquement correcte (cf. Alerte du CEP « Empathie, bien-pensance, conformisme : où va la pub ? »[13]).

Le sujet de l’environnement est au cœur du débat public. En Suède, prendre l’avion est mal vu, alors qu’en Belgique, « l’automobile est reine ». Certains pays expriment des positions tranchées et incitent à une régulation sur ces sujets. Comme mentionné précédemment, certaines municipalités vont jusqu’à prohiber la promotion de certains comportements, telle Édimbourg qui va interdire la publicité pour les compagnies aériennes ou les voitures à moteur thermique. Cependant, la position française, qui encourage la représentation de comportements favorables au respect de l’environnement, n’est pas majoritaire. Globalement, sans pouvoir le démontrer, il semblerait que ces pressions soient moins fortes au niveau européen qu’en France. D’autres problématiques sont plus présentes que l’incitation au respect de l’environnement dans d’autres pays.

Il semblerait que la tendance à un certain conformisme en publicité, que le CEP observe en France, n’affecte pas dans la même mesure les autres marchés européens. En revanche, la publicité est de plus en plus perçue par certains comme un champ de bataille légitime dans les « guerres culturelles ». Notamment au Royaume-Uni, des sujets comme la diversité corporelle, la question du genre et les droits des personnes transgenres prennent de l’ampleur. Les publicités qui interrogent ces représentations entraînent souvent des plaintes ou des commentaires dans les médias, qui peuvent être favorables ou critiques. En Hongrie, le combat culturel se concentre sur la protection de l’enfance et de la famille. La loi sur la protection du consommateur considère la représentation familiale comme une circonstance aggravante en cas de publicité trompeuse, et la loi sur la publicité interdit la promotion de l’homosexualité.

Cette ouverture au débat public permet aux annonceurs de s’adapter rapidement aux changements sociétaux.

Rapport Google sur les annonces bloquées en ligne

 Sur internet, le volume de publicités diffusées rend le copy advice (conseil avant diffusion) ou la remontée des plaintes difficiles. Pour lutter contre les publicités non-conformes, les grandes régies numériques automatisent la régulation des messages diffusés sur leurs canaux. Des régies comme celle de Google détectent et régulent algorithmiquement les publicités qui contreviennent aux standards de l’entreprise. Parallèlement à l’autorégulation, une quantité colossale de publicités non-conformes sont supprimées par le biais d’intelligences artificielles. Dans son Ads Safety Report, Google fournit des chiffres permettant de représenter l’ampleur du phénomène.

En 2023, sur son seul réseau publicitaire, Google a supprimé 5,5 milliards de publicités qui contrevenaient aux règles d’utilisation de sa régie[18] : arnaques, annonces trompeuses, violation du droit des marques… En parallèle, 6,5 milliards de messages ont vu leur audience réduite. Les algorithmes de Google empêchent la publicité de certains secteurs comme les produits financiers, les jeux d’argent ou les contenus pour adultes d’atteindre une cible « inappropriée ». Au total, 12 milliards de messages se sont vus régulés par les algorithmes de Google en 2023.

Durant son audition par le CEP, Google a expliqué que ses algorithmes sont calibrés pour faire appliquer des standards développés à l’échelle « globale ». Si certains de ces standards peuvent varier d’une région à l’autre – c’est le cas de la publicité pharmaceutique – ils n’ont pas vocation à faire appliquer les règles mises en place par l’autorégulation dans chaque pays. Google renvoie d’ailleurs ses annonceurs aux différents codes établis par l’autorégulation[19].

En somme, la modération de la publicité en ligne par les algorithmes est moins un substitut qu’un complément de l’autorégulation. L’intelligence artificielle permet d’examiner un volume de publicités qui, sans elle, passerait sous les radars. A ce titre, chaque organisme d’autorégulation peut mettre en place ses propres algorithmes pour détecter les publicités non conformes aux normes issues de l’autorégulation, à l’image de l’ARPP en France[20].

3.3./ Convergences et divergences sur les plaintes

En raison des différences culturelles, une publicité jugée acceptable dans un pays pourrait ne pas l’être dans un autre, et inversement. Cela peut amener à conclure que les Européens ont des normes à géométrie variable, ou du moins une acceptation des normes qui varie selon les pays. Les médias, notamment, se voient de plus en plus attribuer le rôle d’arbitre concernant les campagnes que leurs clients leur confient. Ils peuvent être amenés à accepter des campagnes dans certains pays et de les refuser dans d’autres, même si les publicités respectent bien les réglementations en vigueur dans les deux cas. La complexité réside dans le fait que cet arbitrage ne repose plus uniquement sur des règles établies, mais est aussi influencé par des facteurs culturels. La décision de diffuser une publicité est souvent liée à la perception qu’elle pourrait être offensante pour certaines personnes ou au fait que le produit concerné, bien que légal, est sujet à controverse pour des raisons sociétales, morales, ou communautaires. Cela semble lié à une tendance du public à critiquer des publicités qui respectent le cadre légal mais sont contestées sur des valeurs plus larges. Les réseaux sociaux amplifient régulièrement ces critiques, en souhaitant ou en exigeant une autorégulation de la profession. Par exemple, une publicité présentant une femme voilée pourrait ne pas susciter de polémique en Angleterre, tandis qu’elle pourrait être controversée en France. Un autre exemple concerne une marque internationale d’“ultra fast fashion” : un média peut se demander s’il accepte de la promouvoir, non pour des raisons légales, mais en raison de préoccupations liées à la durabilité des produits et à la responsabilité du modèle économique de l’entreprise. Certaines filiales européennes peuvent se poser cette question, alors que d’autres non.

Pour approfondir sa réflexion et identifier les points de convergence et de divergence dans l’interprétation des règles déontologiques, le CEP a sollicité l’avis « informel » de six organismes d’autorégulation européens sur quatre plaintes traitées par le Jury de Déontologie Publicitaire en France. Les organismes consultés sont l’Advertising Standards Authority pour le Royaume-Uni, l’Auto Regulação Publicitária pour le Portugal, le Deutscher Werberat pour l’Allemagne, l’Istituto dell’Autodisciplina Pubblicitaria pour l’Italie, l’Önszabályozó Reklám Testület pour la Hongrie et le Reklamombudsmannen pour la Suède. Il ne s’agit pas ici de « juger » ou de porter un jugement de valeur sur les avis des différents jurys, mais de comprendre si l’interprétation des codes et recommandations des autorités d’autorégulation est convergente ou non.

Plainte numéro 1 – sujet nudité

La plainte concerne une affiche extérieure présentant la photo d’un homme entièrement nu, allongé sur le ventre au bord d’une piscine, pour promouvoir une offre de strip-tease masculin dans un cabaret.

Le jury britannique estimerait que la nudité n’est pas sexuellement explicite, car les organes génitaux et les fesses ne sont pas entièrement visibles, l’expression faciale n’est pas sexuellement suggestive, et l’annonce ne contient pas de lingerie ouvertement sexuelle, ni d’accessoires associés à l’activité sexuelle. De plus, un certain degré de nudité est courant au bord d’une piscine. Étant donné que la publicité concerne un spectacle de strip-tease masculin, la nudité est en rapport avec le service annoncé et n’est pas gratuite. La publicité ne serait pas considérée comme dégradante ou exploitante et n’objectiverait pas l’homme en utilisant ses caractéristiques physiques pour attirer l’attention sur un produit sans rapport avec celui-ci. Toutefois une restriction concernant l’emplacement devrait être appliquée.

Le jury portugais considérerait que la publicité est susceptible d’offenser les normes de décence prévalentes dans le système juridique. Il estimerait également que le média utilisé ne permet pas de restreindre les horaires et/ou la segmentation par âge du public, permettant ainsi sa visualisation par n’importe qui, ce qui ne respecte pas les limites imposées par la classification par âge de l’activité. En conséquence, le jury jugerait la plainte fondée.

Le jury allemand considérerait que la position de l’homme n’exprime pas une nudité excessive : il ne pose pas de manière érotique et l’ensemble de la situation ne l’incite pas à révéler sa sexualité. Par conséquent, la publicité ne serait pas jugée non conforme au Code de l’autorégulation.

Le jury italien ne considérerait pas que l’image d’un homme nu, ne montrant aucune partie intime de son corps, puisse être perçue comme vulgaire ou indécente. Il n’y verrait pas l’exploitation d’un stéréotype de genre, ni une forme de discrimination. Un spectacle de strip-tease masculin est une activité légitime dont la publicité est conforme à sa nature. En conséquence, la publicité ne serait pas jugée contraire au code.

Le jury hongrois estimerait que la représentation de l’homme n’est pas irrespectueuse et que la nudité est acceptable, car liée au service de strip-tease masculin. La représentation de l’homme n’exprimant, ni vulnérabilité, ni subordination, l’image ne serait pas considérée comme irrespectueuse ou inacceptable. Néanmoins, comme indiqué par le jury britannique, une restriction serait nécessaire en raison de l’annonce du strip-tease et de la nudité complète du modèle, afin de garantir que les enfants de moins de 18 ans ne puissent pas voir la publicité. Mis à part cette restriction concernant le média véhiculant la publicité, le jury hongrois estimerait que la plainte n’est pas fondée et la rejetterait.

Le jury suédois invoquerait la liberté d’expression et considérerait que la plainte n’entre pas dans le champ d’application du Code ICC. Comme mentionné au paragraphe 1.1, la Suède applique directement le code ICC sans adaptation spécifique.

Le Jury français a jugé que cette représentation était « susceptible de heurter la sensibilité, choquer ou même provoquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence », d’autant qu’il s’agissait d’un affichage sur la voie publique. Il a souligné l’instrumentalisation du corps de l’homme en le réduisant à la fonction d’objet, en l’occurrence d’objet sexuel. En conséquence, la plainte a été déclarée fondée.

Plainte numéro 2 – tromperie du consommateur sur les conditions de production

La plainte concerne la publicité d’une enseigne de restauration montrant un poulet bondissant sur le ventre d’une vache allongée sur le dos, les pattes en l’air, au milieu d’un troupeau paissant dans une prairie. Le plaignant reproche notamment le caractère mensonger du cadre naturel présenté, en contradiction avec la réalité des conditions d’élevage des poulets.

Le jury britannique considérerait que la publicité est quelque peu surréaliste et la percevrait comme de l’humour. Il estimerait que l’annonce ne contient aucune allégation directe ou implicite concernant l’environnement ou le bien-être des animaux, surtout compte tenu de son ton comique et surréaliste. En conséquence, il n’y aurait pas de violation du code.

Le jury portugais estimerait que la publicité est une hyperbole, perçue comme telle, et qu’elle ne devrait pas être considérée comme trompeuse. Le consommateur moyen ne serait pas susceptible d’être induit en erreur. Il considérerait que la publicité ne renseigne pas sur la manière dont les poulets sont élevés, car elle ne contient aucune mention implicite ou explicite à ce sujet. En conséquence, il n’y aurait pas de violation du code.

Le jury allemand estimerait également que le consommateur comprend que la publicité est humoristique et qu’elle ne représente pas les conditions d’élevage des poulets. En conséquence, il n’y aurait pas de violation du code.

Le jury italien ne verrait aucune allégation relative au bien-être animal ou à la qualité environnementale du produit annoncé. En conséquence, il considérerait que la publicité n’est pas contraire au code.

Pour le jury hongrois, la scène ne serait pas à prendre au pied de la lettre et le consommateur le comprendrait parfaitement. Bien que l’on puisse reprocher à la publicité de se moquer des animaux, le caractère absurde et humoristique atténuerait cet aspect. Comme le jury allemand, le jury hongrois estimerait que la publicité ne concerne pas le mode d’élevage des poulets. En conséquence, il n’y aurait pas de violation du code.

Le jury suédois considérerait également qu’il n’y a pas de tromperie en raison de l’humour. Il estimerait que le consommateur moyen sait probablement que les poulets ne sont pas toujours élevés en liberté.

Le Jury français a jugé que la publicité est de nature à induire le consommateur en erreur et méconnaît ainsi les principes de loyauté et de véracité repris dans le code ICC, en raison de l’importance du décalage entre la représentation du poulet et la réalité des conditions d’élevage, ainsi que de la sensibilité particulière du public à cette question.

Plainte numéro 3

La plainte concerne une publicité diffusée sur Facebook montrant un véhicule à l’arrêt dans un décor fictif, accompagné de textes tels que « {nom du véhicule} passe et tu t’écartes, {nom du véhicule} domine et tu t’inclines ». Ces textes font référence à une séquence d’une émission de télévision devenue virale sur les réseaux sociaux : « Marina passe et tu t’écartes, Marina domine et tu t’inclines ». Le plaignant reproche à la publicité d’inciter les conducteurs à se sentir les “rois de la route” et à ne pas respecter les autres usagers.

Le jury britannique estimerait que les textes peuvent faire allusion à la domination, mais qu’il est peu probable que les lecteurs les comprennent comme des instructions littérales promouvant un style de conduite agressif ou irresponsable. Le texte est accompagné d’un emoji rouge à lèvres et d’un mot-dièse, ce qui indiquerait un ton plus léger. Les consommateurs pourraient donc comprendre ou déduire que le texte est une réplique comique ou une référence à un mème. En conséquence, il n’y aurait pas de violation du code.

Le jury portugais pourrait considérer que les textes peuvent être interprétés comme une expression de supériorité et une attitude potentiellement agressive de la part du conducteur du véhicule. Ils pourraient également être perçus comme offensants ou potentiellement contraires à la dignité humaine s’ils suggèrent la soumission d’autres personnes dans le contexte du trafic, rendant la publicité irrespectueuse et, par conséquent, contraire à la dignité humaine. Cependant, le Jury n’estimerait pas que ces textes aient pour effet d’influencer des comportements agressifs ou négatifs dans le trafic, les slogans publicitaires pouvant être interprétés de manière métaphorique. En conséquence, la plainte serait rejetée.

Le jury allemand considérerait que le texte encourage des comportements agressifs et antisociaux, ce qui constituerait une violation du code général. Le jury estimerait que l’allusion à la séquence de l’émission de télévision n’est pas suffisamment évidente pour les consommateurs ; si la référence était claire, l’évaluation serait différente et en faveur de l’annonceur.

Le jury italien jugerait que les expressions utilisées ne se réfèrent pas à des caractéristiques précises du véhicule et ne mentionnent pas explicitement sa puissance ou sa vitesse. Elles pourraient, à la limite, être considérées comme l’expression d’une bravade et d’arrogance et ne sont pas associées à des images de la voiture en conduite active, ni en circulation. Le message n’offrirait donc pas un modèle explicite de conduite à imiter, ni ne présenterait d’éléments qui suggèrent une conduite particulièrement rapide, téméraire ou imprudente, ou qui pourraient inciter les destinataires à se comporter de manière à les exposer à des situations à risque, au mépris des règles de prudence et de responsabilité indispensables à la conduite des véhicules. En conséquence, il n’y aurait pas de violation du code.

Le jury hongrois considérerait que la formulation “dépasse” fait référence à la conduite, encourageant la conduite rapide et agressive, c’est-à-dire un comportement dangereux au volant, et donc inacceptable. La plainte serait considérée comme fondée.

Le jury suédois estimerait que les consommateurs en général perçoivent probablement la publicité comme risquant d’encourager une conduite inappropriée ou dangereuse.

Le Jury français a jugé que la publicité traduit l’idée d’une hiérarchie et d’un rapport de force qui prennent un sens particulier s’agissant d’un véhicule motorisé. Même sur un ton humoristique, elle accrédite l’idée que le conducteur de ce véhicule pourrait dominer la route, ce qui est incompatible avec le code de la route et l’exigence d’une conduite respectueuse de chacun. Le jury estime que la publicité en cause méconnaît les dispositions déontologiques.

Plainte numéro 4

La plainte concerne une vidéo publicitaire pour une offre d’alimentation pour chats, dans laquelle des images de chats et de produits sont accompagnées des textes suivants : « Enfin des aliments sains pour votre chat, écoresponsables, avec une composition irréprochable », « l’alimentation pour chat la plus saine et la plus savoureuse du monde », « pour éviter les troubles digestifs, les vomissements, les diarrhées et les maladies chroniques », « une meilleure digestion », « pas de problèmes digestifs », « des selles moins odorantes ». Le plaignant considère que l’expression « l’alimentation pour chat la plus saine et la plus savoureuse du monde » devrait être relativisée, que des témoignages ne démontrent pas des propriétés bénéfiques pour la santé, et que l’affirmation « la meilleure alimentation pour sa croissance » est formulée sans preuve comparative.

Le jury britannique considérerait qu’il y a eu violation des codes publicitaires. Cependant, si l’annonceur avait immédiatement répondu en apportant des modifications à la publicité, le jury aurait probablement donné des conseils plutôt que de poursuivre l’affaire dans le cadre d’une enquête formelle. Dans le cadre d’une enquête formelle, le jury demanderait à l’annonceur de fournir des preuves documentaires solides démontrant que son produit est plus sain que toutes les marques concurrentes. Il contacterait également le Veterinary Medicines Directorate, l’organisme gouvernemental britannique de réglementation de la santé qui supervise la réglementation des médicaments vétérinaires, pour déterminer si les allégations étaient d’ordre médical ou si le produit contenait des éléments susceptibles de lui conférer un effet médical. Si les allégations publicitaires n’étaient pas classées comme médicinales, le jury exigerait de l’annonceur qu’il fournisse des preuves à l’appui de ses allégations. Il jugerait qu’il est très improbable que l’annonceur dispose de preuves appropriées pour des allégations générales et lui conseillerait d’utiliser une allégation plus spécifique et d’expliquer ce qu’elle signifie dans l’annonce.

Le jury portugais estimerait que les allégations superlatives telles que « la nourriture pour chats la plus saine et la plus savoureuse du monde », sans preuves concrètes, sont susceptibles d’induire en erreur par exagération injustifiée. Les allégations doivent être fondées sur des preuves vérifiables, et toute revendication de santé (même animale) doit être soutenue par des études scientifiques valides et acceptées par la communauté scientifique. Les allégations de bienfaits pour la santé telles que « meilleure digestion », « sans problèmes digestifs », « selles moins odorantes », n’étant pas scientifiquement validées, constitueraient une publicité trompeuse et ne pourraient être remplacées par les retours ou témoignages de clients montrant satisfaction ou amélioration dans la santé de leurs chats. En conséquence, le code ne serait pas respecté.

Le jury allemand estimerait que le sujet relève de la régulation juridique, à travers le Lebensmittel, Bedarfsgegenstände und Futtermittelgesetzbuch (Code des denrées alimentaires et des aliments pour animaux), et non de l’autorégulation. Le Wettbewerbszentrale (centre de la concurrence) serait plus approprié pour traiter cette plainte. Il précise que le LFGB n’autorise pas la publicité pour les prémélanges d’aliments pour animaux avec la promesse de prévenir des maladies qui ne sont pas le résultat d’une mauvaise alimentation.

Le jury italien jugerait que ces allégations ne sont, ni contextualisées, ni relativisées, ni étayées par des études scientifiques afin d’établir la prévalence et les qualités supérieures du produit par rapport à des produits similaires ; les témoignages ne pourraient être invoqués à cette fin. Il estimerait que le consommateur moyen serait induit en erreur par la formulation du message. En conséquence, il y aurait violation du code.

Le jury hongrois considérerait que les allégations ne sont acceptables que si elles sont justifiées conformément aux normes du secteur, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence. Il estimerait que la plainte est fondée.

Le jury suédois jugerait que les allégations selon lesquelles la nourriture pour chats est la meilleure et la plus saine au monde sont vagues et non spécifiques. Ainsi, si l’annonceur ne pouvait pas justifier ses affirmations, la plainte serait fondée.

Le Jury français a relevé que l’affirmation des messages en cause n’est, ni relativisée, ni contextualisée ; la seule référence à une liste d’ingrédients classiques composant le produit ne pouvant tenir lieu de référence alors qu’elle n’est étayée par aucun travail scientifique. En outre, il a estimé que le vocabulaire utilisé quant à une nourriture « la plus saine et la plus savoureuse du monde » ne reposait sur aucun justificatif. Par ailleurs, les allégations fonctionnelles ne sont accompagnées d’aucune justification, preuve ou démonstration scientifique. En conséquence, le Jury est d’avis que ces publicités méconnaissent les règles déontologiques précitées.

L’étude de ces plaintes par des jurys de différents pays montre que, même si les cadres d’autorégulation reposent sur les mêmes principes, les interprétations varient selon le rapport à la culture, à l’humour et à la sensibilité des habitants d’un pays sur certains sujets.

4./ Conclusion et recommandations

“In varietate concordia”[14], la devise de l’Union européenne, pourrait également s’appliquer aux organismes d’autorégulation de la publicité en Europe.

Les principes communs d’“une publicité légale, véridique, honnête et décente”, promus par le Code ICC, sont complétés par des spécificités nationales façonnées par l’histoire politique, l’héritage culturel, ainsi que le contexte social et économique de chaque pays. Les organismes d’autorégulation ont la capacité de percevoir et d’analyser les particularités culturelles comme les tendances sociétales. Elles peuvent être considérées, à ce titre, comme capables de donner des réponses adaptées aux réalités et aux singularités de la société dans laquelle ils opèrent.

L’échange de “bonnes pratiques”, notamment à l’initiative de l’Alliance Européenne pour l’Éthique en Publicité, participe à élever les standards et les exigences à travers l’Europe.

Cependant, les investigations du CEP mettent en lumière la contradiction qui existe entre, d’une part, la volonté d’uniformisation portée par certains, et, d’autre part, l’indéniable variété des représentations, des cultures, et donc de l’orientation des débats publics. Ce qui est discuté en France n’est pas nécessairement débattu ailleurs. Ainsi, l’existence d’un activisme anti-pub et l’importance de la question environnementale apparaissent de façon inégale en fonction des pays européens.

Les velléités de standardisation internationale portées par certains se heurtent donc nettement à l’hétérogénéité des contextes nationaux et aux exigences de respect des diversités culturelles. En conséquence, le CEP ne recommande pas la mise en place d’un organisme d’autorégulation pan-européen.

Au contraire, cette diversité a pour intérêt de contraindre les partisans d’une régulation européenne, notamment les grandes plateformes technologiques et certains grands annonceurs internationaux, à s’adapter aux cultures locales. Les spécificités culturelles, les tendances sociétales et le paysage normatif de chaque pays exigent une souplesse et une adaptation du message publicitaire pour que celui-ci soit acceptable, respectueux et efficace.

D’autant que cette diversité culturelle, qui se reflète dans la législation et dans l’autorégulation, ne semble pas restreindre la créativité des marques internationales. Au contraire, elle est susceptible de la respecter, en permettant aux marques de se rapprocher des enjeux et des spécificités nationales.

Au vu de ce comparatif européen, le CEP invite l’ARPP à approfondir sa réflexion sur :

  1. Le renforcement, voire le durcissement, du dialogue avec les autorités publiques, qu’elles soient européennes, nationales ou locales, afin que les modifications envisagées de textes relatifs à la publicité, à l’économie des médias et à la communication soient précédées d’études d’impact, et fassent l’objet de bilans après leur mise en œuvre. Cette recommandation n’ignore pas la réalité d’une cohabitation de logiques contradictoires, et l’éventualité d’une confrontation autour d’objectifs et d’agendas parfois divergents, lesquels restent la signature de tout fonctionnement démocratique.
  2. L’amplification de l’arsenal de mesures « designer pour discréditer » (“name and shame”), en s’inspirant notamment des pratiques britanniques et allemandes. Cela pourrait être en signalant à la presse spécialisée les avis les plus significatifs du Jury de Déontologie Publicitaire, et en lui transmettant une fois par an la liste des annonceurs et créateurs de contenus qui, de manière réitérée, n’ont pas respecté le code de déontologie, voire n’ont même pas répondu aux sollicitations du Jury de Déontologie Publicitaire.

Le CEP invite l’ARPP et l’ensemble de ses homologues exerçant dans l’espace européen à coordonner les canaux de communication pour les consommateurs afin de simplifier et d’uniformiser la procédure de dépôt de plaintes auprès des jurys.

Par ailleurs, le principe original de l’autorégulation en France est la négociation et la cohabitation entre trois logiques : celles des annonceurs, des agences et des médias. Chacun sait qu’ils ont leurs propres intérêts et leurs propres visions. Pour autant, le CEP rappelle que l’autorégulation n’est pas un entre-soi entre professionnels. L’autorégulation est une discipline librement consentie afin que la publicité soit “honnête, transparente et responsable”.

Elle ne s’oppose pas au droit dur, mais le complète. Pour accroître la crédibilité et la visibilité de cette autorégulation, il importe de :

  1. Valoriser les discussions existantes parfois contradictoires avec les autorités administratives.
  2. Mieux faire dialoguer les consommateurs, les associations et les ONG et le Jury de déontologie Publicitaire (JDP) en dehors du traitement des plaintes
  3. Faire la publicité de l’autorégulation, pour expliquer dans le débat public qu’elle est garante de souplesse et de réactivité, et donc d’efficacité. Rappeler à l’occasion que l’autorégulation ne juge que le contenu de la publicité. Dans un cadre de marché unique européen, l’interdiction d’un produit et/ou de faire de la publicité pour un produit relève, elle, de la loi.

 Le CEP constate, pour sa part, l’utilité de ce système d’autorégulation : les divers baromètres et études de l’ARPP révèlent un pourcentage élevé de conformité des publicités. En témoignent les 93,6 % de conformité à la recommandation ”Développement Durable” du douzième bilan « Publicité et environnement » de l’ARPP et l’ADEME portant sur les publicités liées à l’environnement diffusées fin 2023 et début 2024[15]. De même seuls trois manquements à la recommandation « Image et respect de la personne » ont été relevés sur 13 743 publicités analysées dans le dix-septième bilan « Publicité & image et respect de la personne » publié en 2023[16].

Bibliographie

  • GALA Advertising Law Book – Troisième édition (2024)
  • Private Regulation and Enforcement in the EU, Finding the Right Balance from a Citizen’s Perspective, édité par Madeleine de Cock Buning et Linda Senden, chapitre “Trust through Responsibility: Advertising and Self-Regulation in Europe” d’Oliver Gray
  • European trends in advertising complaints, copy advice and pre-clearance 2022, Alliance Européenne de l’Ethique en Publicité[17]
  • Vive l’incommunication. La victoire de l’Europe, de Dominique Wolton, éditions François Bourin, 2020.
  • Jacques Delors. L’unité d’un homme, de Dominique Wolton, Odile Jacob, 1994
    Entretiens avec Dominique Wolton.
  • La dernière utopie. Naissance de l’Europe démocratique, de Dominique Wolton, Flammarion, 1993.
  • Revue Hermès N°93 : L’Europe du Nord, si proche, si lointaine, septembre 2024
  • Revue Hermès N°90 : L’Europe entre incommunications et guerres, octobre 2022
  • Revue Hermès N°77 : Les incommunications européennes, mai 2017

Cet avis, encadré par Albert ASSERAF, Brice MANGOU, Rémi DEVAUX, accompagnés de Lucas BOUDET et Tudor M. MANDA de l’Alliance Européenne de l’Ethique en Publicité, coordonné et co-rédigé par Bertrand ESPITALIER, synthétise les réflexions du Conseil de l’Ethique Publicitaire, dont les membres et experts sont : Dominique WOLTON, Christine ALBANEL, François d’AUBERT, Pascale MARIE, Zysla BELLIAT, Benoit LE BLANC, Brice MANGOU, Charles BERLING, Fabienne MARQUET, Albert ASSERAF, Pascal COUVRY, Denis GANCEL, Clémence GOSSET, Thierry LIBAERT, Gérard UNGER, Rémi DEVAUX, Cristina LINDENMEYER, avec la participation d’Alain GRANGÉ CABANE (Réviseur de la Déontologie Publicitaire).

Ont été auditionnées dans ce cadre les personnes suivantes :

  • Lucas BOUDET†, Directeur Général de l’Alliance Européenne pour l’Ethique en Publicité (EASA)
  • Caroline BOUVIER, Avocat associé du cabinet Bernard-Hertz-Béjot et représentant français de la Global Advertising Lawyers Alliance (GALA)
  • Tamara DALTROFF, CEO de l’Association européenne des agences de communication (EACA)
  • Laureline FROSSARD, Directrice affaires publiques et juridiques de l’Union des marques
  • Oliver GRAY, coprésident du groupe de travail sur la révision du code ICC
  • Monika MAGYAR, Senior Legal Advisor’s de l’Association européenne des agences de communication (EACA)
  • Chiara ODELLI, Head of Industry Relations EMEA de Google
  • Ophélie RAIMBAULT-GERARD, avocate collaboratrice du cabinet Bernard-Hertz-Béjot
  • Catherine SEDILLIERE, Advertising Industry Relations Manager de Google France.

[1] Dominique Wolton

[2] “Denken heißt vergleichen”, Walther Rathenau, industriel allemand, Ministre de la Reconstruction (mai-octobre 1921), puis Ministre des Affaires étrangères (février-juin 1922) de la République de Weimar. Berlin 1867-Berlin 1922

[3] L’autorégulation désigne le processus par lequel un secteur d’activité se régule lui-même, sans intervention directe de l’État ou d’une autorité externe. Quant à la co-régulation, c’est un processus qui articule les efforts des acteurs privés et l’intervention des pouvoirs publics.

[4] Dieudonné Mandelkern (1931-2017), président de section honoraire au Conseil d’État

[5] https://commission.europa.eu/law/law-making-process/planning-and-proposing-law/better-regulation/better-regulation-guidelines-and-toolbox_en

[6] En 1991, Sir Leon Brittan (1939-2015), alors vice-président de la Commission européenne et commissaire chargé de la politique de la concurrence, a mis le secteur de la publicité au défi de trouver des moyens de résoudre les problèmes soulevés par la création du marché unique par le biais de l’autorégulation, évitant ainsi la nécessité d’une législation détaillée, à laquelle le secteur s’opposait. Plus tard dans l’année, les représentants du secteur de la publicité de toute l’Europe se sont mis d’accord pour donner un statut officiel et indépendant à un groupe jusqu’alors ad hoc d’organismes nationaux d’autorégulation (SRO) provenant d’un certain nombre de pays européens dont le BVP en France. Le nouvel organisme, créé en 1992, s’est appelé l’Alliance européenne pour l’éthique en publicité (AEEP).

[7] www.jdp-pub.org/statuts-et-ri/#art15

[8] www.arpp.org/influence-responsable/createurs-de-contenus-certifies/

[9] https://commission.europa.eu/document/download/e6cd4328-673c-4e7a-8683-f63ffb2cf648_en?filename=Political%20Guidelines%202024-2029_EN.pdf

[10]  Communiqué de l’ARPP le 1er août 2024 : Le Certificat de l’Influence Responsable de l’ARPP devient européen ! www.arpp.org/actualite/certificat-de-influence-responsable-de-arpp-devient-europeen/

[11] Les annonceurs et les agences de publicité peuvent solliciter l’expertise des juristes-conseil de l’ARPP sur tous médias et pour toutes formes de communications commerciales, à tous stades du processus créatif.

Concernant les spots publicitaires, avant diffusion à la télévision ou sur un service de médias audiovisuels à la demande, ils doivent avoir été soumis à l’ARPP et avoir reçu un “avis favorable”. Pour délivrer cet avis, l’ARPP vérifie que le spot est conforme aux dispositions légales et déontologiques.

[12] Martin, Marc (2016). Histoire de la publicité en France. Presses universitaires de Paris Nanterre

[13]  www.cep-pub.org/actualite/alerte-1/

[14] “Unis dans la diversité”

[15] www.arpp.org/actualite/categorie/bilans-et-observatoires/publicite-et-environnement/

[16] www.arpp.org/actualite/publicite-et-image-et-respect-de-la-personne-2023/

[17] www.easa-alliance.org/wp-content/uploads/2023/11/2022-European-Trends-in-Advertising-Complaints-Copy-Advice-and-Pre-Clearance.pdf

[18] Google Global Ads Safety Report 2023

[19] Google Ads, Liste des codes du secteur publicitaire. https://support.google.com/adspolicy/answer/11108174

[20] ARPP, Avec « Invenio », l’ARPP franchit une nouvelle étape issue de sa R&D dans l’accompagnement déontologique de la publicité digitale, 11 juin 2020.