Publicité et nouvelles censures - la publicité bouc émissaire

Parution de la troisième publication des Cahiers du Conseil de l’Ethique Publicitaire

L'actualité du CEP

Le CEP publie aujourd’hui la troisième livraison de sa publication Publicité et société – Les cahiers du Conseil de l’éthique publicitaire, sur la base de l’avis intitulé « Publicité et nouvelles censures – la publicité bouc émissaire » rendu public le 25 août 2020.

Cette parution comprend également une tribune libre de Dominique Wolton : « Publicité ? Penser ce clair-obscur ».

Rappelons que le Conseil de l’éthique publicitaire (CEP), instance indépendante ouverte à la société civile et présidée par le sociologue Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS, est associé au dispositif de régulation professionnelle de la publicité porté par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP). Il a pour mission d’éclairer les acteurs sur l’évolution des rapports entre la publicité et la société, et d’approfondir la réflexion éthique sur le contenu de la publicité et l’extension de ses formats. Analyser les mécanismes en marche dans cette évolution l’amène à proposer une réflexion sur les critiques dont la publicité fait l’objet, en mettant à distance ses propres a priori de nature morale ou idéologique.

Si le CEP s’est emparé de ce sujet des « nouvelles censures », c‘est que l’inquiète l’appropriation peu contestée de quelques grandes questions d’intérêt général par des groupes de personnes qui se réservent le droit de les « penser », et que notre pays perd, peu à peu, le goût de la confrontation intellectuelle et du débat d’idées pour se laisser glisser dans le confort illusoire de la rectitude idéologique.

Il accueille donc avec une grande satisfaction le débat que la publication de son avis a fait naître, et se réjouit de l’intérêt suscité par ce thème de la « publicité bouc émissaire », sur lequel beaucoup reste encore à penser, et à travailler.

Ayant pris connaissance de propositions radicales, le CEP constate que l’année  2020 voit sonner en France une charge puissante contre la publicité, inédite dans son ampleur et son intensité.

Dans ce dernier Avis, le Conseil de l’Ethique Publicitaire observe que cet assaut marque en réalité la convergence de deux phénomènes en nette progression ces dernières années. D’un côté, l’émergence de nouvelles censures nées de la montée d’une bien-pensance victimaire largement importée des campus américains. De l’autre, la lente fabrication d’un système interprétatif monolithique, qui fait de la publicité le symbole expiatoire de phénomènes qui résistent à l’explication et à l’action, qu’il s’agisse des rapports interhumains, de certaines ruptures économiques et sociales, ou des menaces climatiques et environnementales.

Accusée de causer ou d’entretenir, tant les maux individuels (addictions, frustrations, mésestime de soi), que les désordres collectifs (inégalité homme/femme, insuffisante diversité et désordres climatiques), la publicité constitue un bouc émissaire idéal face à la résistance des organisations sociales, et aux pièges des systèmes de représentation, quels qu’ils soient.

Dans la mesure où elle s’appuie sur des idéologies d’autant plus difficiles à critiquer qu’elles en appellent à l’intérêt général et aux valeurs progressistes, cette évolution n’est pas sans danger pour nos sociétés démocratiques. Surtout qu’elle s’inscrit dans le contexte d’une demande sociale croissante de censure, d’autorité et de sanction, et d’une tension entre les attentes de sécurité et de liberté que la crise sanitaire de la COVID-19 semble avoir encore accrue.

Le Conseil de l’Ethique Publicitaire alerte sur les risques d’une tyrannie des communautés, d’une anesthésie de la pensée critique et d’un « hygiénisme » social qui convoquerait la publicité pour une éducation culturelle à visée moralisatrice. Il s’inquiète de constater une certaine autocensure de la part des professionnels – marques comme créatifs – par intériorisation de la nouvelle norme sociale, et de l’interdit.

Adulte et responsable, la publicité n’a pas forcément vocation à être édifiante. La suroffre actuelle des marques dans la proposition d’une « responsabilité sociale élargie » les expose à l’accusation d’insincérité. Elle s’accompagne par ailleurs d’une obligation permanente de repentance qui nourrit, paradoxalement, les reproches qui lui sont faits.

La montée des individualismes et du « politiquement correct » amène aujourd’hui à la revendication d’une liberté du récepteur sans limite – et de ses abus – jugée supérieure à celle de l’émetteur, pourtant encadrée par le droit dur et garantie par une construction de droit souple (autorégulation) longuement murie. Le CEP observe que loin de l’impérialisme fantasmé de la publicité, la réalité est celle d’un secteur marqué depuis 30 ans par une réglementation dont l’abondance et la complexité sont uniques au monde, et par la négociation continue, et même institutionnalisée avec le monde associatif, notamment via la proposition qui leur est faite de siéger au sein d’une autre instance associée de l’ARPP, le Conseil Paritaire de la Publicité.

Autour des enjeux d’une régulation encore plus stricte de la publicité, le Conseil de l’Ethique Publicitaire en appelle à une forte mobilisation des professionnels. Loin de faire profil bas, ses acteurs doivent prendre fortement la parole pour dénoncer les mécanismes de sa diabolisation, et démontrer l’hypocrisie sociale qui accompagne les critiques dont elle fait l’objet.

Consultez l’avis Publicité et nouvelles censures – la publicité bouc émissaire

Cet avis, rédigé par Pascale MARIE, synthétise les réflexions du Conseil de l’Ethique Publicitaire composé de : Dominique WOLTON (président), François d’AUBERT, Zysla BELLIAT, Myriam BOUCHARENC, Laurence DEVILLERS, Catherine JEAN-JOSEPH SENTUC, Cristina LINDENMEYER, Pierre-Marie LLEDO (personnalités indépendantes) ; Albert ASSERAF, Pascal COUVRY, Clémence GOSSET, Thierry LIBAERT, Natalie RASTOIN, Gérard UNGER, (professionnels), avec la participation d’Alain GRANGÉ CABANE (Réviseur de la Déontologie Publicitaire).

Contacts presse : ARPP – Stéphane Martin, Directeur Général, +33 (0)1 40 15 15 26
CEP – Pascale Marie, Consultante, +33 (0)1 40 15 15 26 – https://www.arpp.org/contact/

Paris, le 24 novembre 2020.